Conservatrice du patrimoine, directrice des Musées d’Évreux Portes de Normandie : Musées d’Art, histoire et archéologie d’Evreux et des instruments à vent à la Couture Boussey.
Bienvenue Camille, dis-nous tout, d’où viens-tu ?
Je suis arrivée à Evreux peu après l’annonce du 2e confinement le 2 novembre dernier.
En 2019/2020, j’ai suivi une formation d’un an et demi de conservateur à l’Institut National du patrimoine.
Auparavant j’étais médiatrice culturelle au Louvre-Lens, en charge de recrutement de nouveaux publics notamment. J’aime la médiation ludique par le jeu (énigmes, chasses au trésor, escape game, visites sportives…) ; j’ai travaillé également avec le monde du handicap et développé des actions hors les murs.
Pourquoi vouloir être conservateur ?
On oppose souvent le médiateur qui œuvre vers les publics et le conservateur qui œuvre pour les œuvres ? Aujourd’hui, je souhaite créer une connexion entre les 2. C’est un vrai challenge de donner des clés de compréhension de la culture et des musées au plus grand nombre. De pouvoir questionner le public autour du patrimoine vivant à travers le genre ou le rapport à la nature notamment. D’ailleurs le Musée est associé au festival #anthroposcènes programmé par le Tangram en avril prochain [on croise les doigts NDLR], nous allons faire un accrochage, dans le chemin de ronde, de planches du botaniste Francis Hallé. Cet accrochage fera écho aux œuvres des collections du Musée de paysages du 19e jusqu’à la période contemporaine.
Super, voilà des projets… Vous êtes fermés au public depuis presque 4 mois maintenant. Qu’est ce qui se passe en ce moment au Musée ?
Une partie des agents d’accueil et de surveillance sont pour le moment replacés dans des structures d’aide à la personne notamment. La régie se charge de toutes les œuvres en voyage un peu partout en France : prolongation et décalage de nombreuses expositions. Nous avons en ce moment d’ailleurs un souci de rapatriement des œuvres de Renée Levi en Suisse car les « accompagnants » ne peuvent pas passer la frontière !
Les équipes ont également mis à profit cette période « d’attente » pour réaménager les réserves.
Les équipes de médiation animent les réseaux sociaux et la page Facebook principalement et travaillent activement sur nos prochains évènements.
Dès la réouverture : l’exposition archéologique « Livrer passage » et l’accrochage « En aparté » au 1er étage autour de la toilette des femmes au 18e s. avec une mise en perspective d’une peinture du 18e s et d’une photo contemporaine de femme de Charles Fréger.
Nous avons également le projet d’une exposition dans le cadre de #Flaubert21 (l’année 2021 est l’année du bicentenaire de la naissance de Gustave Flaubert). Sur la base du « Dictionnaire des Idées reçues », nous allons prendre un mot et sa définition et le mettre en lien avec des œuvres des collections du musée. L’idée est de créer un décalage ludique du regard et de lire différemment les œuvres (juin).
Une autre exposition, d’art contemporain cette fois, avec l’artiste sculpteur Peter Briggs, professeur aux Beaux-Arts à Tours. Des œuvres toute en volume en céramique, biscuit de porcelaine, des installations composites, qui seront installées dans le chemin de ronde (juin)…
En effet, le moins qu’on puisse dire, c’est que vous ne chômez pas… revenons à toi : comment concilier la direction de 2 musées si différents (le musée d’art, histoire, archéologie d’Evreux et le musée des instruments à vent à la Couture Boussey) ?
J’ai la chance de pouvoir me reposer sur les compétences de Emanuele Marconi, directeur du MIV. Le challenge : pouvoir faire dialoguer d’ici un an ou deux les 2 musées et leurs collections respectives. Dans un premier temps, nous allons travailler sur des événements et une offre couplée pour la visite des 2 musées.
Et avec les Micro folies d’Evreux ?
Pour l’instant, les Micro Folies travaillent avec des œuvres numérisées au niveau national, nous mettons en place avec la Fabrique de Patrimoines, un gros travail de numérisation des œuvres de notre musée pour que les Micro Folies puissent élaborer un programme d’ateliers avec.
Après le Louvre-Lens, pourquoi Evreux ?
Pour le défi, le challenge… J’ai ici deux établissements avec une richesse et une complexité de collections et je dois trouver des passerelles… C’est stimulant. Et être installée dans un magnifique monument historique adossé sur les remparts gallo-romains, je me sens toute petite face à ces siècles d’histoire ! Un vrai patrimoine à 360° !!
Autre défi : faire évoluer la perception des publics ; créer une accessibilité autant culturelle que physique, faire d’une visite au musée une activité quotidienne.
Et nous avons également un gros projet de rénovation, nous en sommes à l’étape d’états des lieux des besoins et des envies.
Au Comptoir, nous avons 4 mots valeur que nous aimons confronter à nos partenaires. Si je te dis :
Contemporain
Les collections contemporaines du Musée… Quelle heureuse surprise de découvrir des collections si riches : Soulage, Hans Hartung, Simon Hantaï…
Optimiste
La structure et la Reconstruction de la ville… témoin de résilience, une renaissance dans la pierre. Je suis originaire d’Amiens et je retrouve mes marques dans ce patrimoine de la reconstruction.
Partagé
Pas facile en cette période où chacun doit rester chez soi … Mais je suis médiatrice avant tout, le partage c’est mon métier !
Original/originel
Travailler dans un monument historique, monument au cœur de la ville médiévale est une vraie chance…
Question plus difficile, malgré le Covid, ces confinements, ces couvre-feux : as-tu déjà des bons plans sur Evreux ?
Le marché du samedi matin. Je découvre la Normandie par ses produits locaux et j’adore ça… Le Cidre fermier, miam ?